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Préface par André S. CHARBIT Président de La Fraternelle, de l’ouvrage "TLEMCEN - Mille ans d'histoire d'une communauté juive".

La vie n'était pas toujours facile à Tlemcen et les misères n'y étaient pas rares, mais nous y étions heureux.  

Même ceux qui étaient partis s'établir à Oran, au Maroc ou en métropole se plaisaient à rappeler leur origine tlemcénienne, énumérant les membres de leur famille, proche ou lointaine, qui en étaient issus, faisant le compte des mariages qui les avaient reliés entre eux : nous étions le fils ou la fille de..., le petit-fils ou le cousin de...

Ces rappels ne faisaient que nous rapprocher davantage. Il y avait aussi des querelles, mais elles restaient toujours des petites querelles de famille.

 

 

En 1962, nous avons pu craindre que tout cela s'écroule, et les premières années de notre rapatriement n'ont pas toujours favorisé notre regroupement. Les soucis du quotidien étaient si nombreux que, souvent, il n'y avait plus beaucoup de temps pour autre chose.  

Cependant, la solidarité traditionnelle des Tlemcéniens n'a jamais cessé d'étendre ses bienfaits sur ceux qui en avaient le plus besoin. Cette même solidarité nous a empêchés de nous abandonner et d'oublier ce que nous avions été. Grâce au ciel, nous avons pu nous regrouper, avec l'aide et les conseils de nos amis et parents qui nous avaient précédés en métropole, s'y étant établis dès la fin de la Seconde Guerre mondiale.  

Nous devons rendre hommage à tous ceux qui ont repris le drapeau de La Fraternelle, et qui ont recréé autour d'elle notre petit Tlemcen. Nous devons remercier tous ceux qui depuis 1947, grâce à la clairvoyance dont ils ont alors fait preuve par cette initiative, furent les instigateurs du regroupement.  

Nous tenons de même à dire toute notre reconnaissance à nos rabbins Jacob Charbit Zal et Haïm Touati Zal, de même qu'au rabbin Salomon Tapiéro et au hazan Marcel Attias, qui ont si longtemps dirigé nos offices. 

Nous devons également rendre hommage à tous ceux qui, à Paris comme à Marseille, ont permis aux Tlemcéniens de se retrouver entre eux. Notre reconnaissance va aux membres-fondateurs de notre communauté à Paris ainsi qu'à ceux qui, installés à Marseille en 1962, ont su créer la synagogue du 14, rue Saint-Dominique.  

Nos remerciements vont enfin à tous ceux, membres du conseil d'administration ou simples fidèles, dont l'aide et le dévouement permettent la vie quotidienne de La Fratemelle. 

La situation nouvelle du judaïsme a rapproché nos communautés. Après le grand et tragique bouleversement des communautés juives d'Europe est venu notre tour : nous n'avons pas été décimés, mais nous sommes partis ensemble. Aujourd'hui encore, les familles peuvent se réunir : les enfants et les petits-enfants peuvent rendre visite à leurs parents et grands-parents, mais ce n'est plus l'intimité d'antan.  

Si notre tradition de convivialité a survécu, ce n'est plus celle de tous les jours. Nous sommes dispersés dans des villes immenses, et nous sommes heureux de constater que nous désirons toujours nous rencontrer.  

 

A Tlemcen, il n'était pas nécessaire de le vouloir : nous vivions ensemble.