Gazette du dimanche 23 octobre 2022

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Morial

Mémoire et traditions
des Juifs d'Algérie

Lettre d'information n° 528 du 23 octobre 2022

Association Loi 1901, à but non lucratif d’intérêt général à caractère historique et culturel

 

 
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                  Fils de Crémieux

 

                             par 

 

               Albert Bensoussan

 

 

 

 

 

Mon grand-père maternel, Messaoud Benayoun, fut fait français en 1870 et aussitôt en partance pour la guerre, alors que du côté paternel, Yehouda Bensoussan était un Marocain établi en Algérie, ce pourquoi si ma mère est née (en 1895, à Nedroma) française, mon père (né en 1890 à Nemours) fut naturalisé français à 18 ans par droit du sol et aussitôt appelé sous les drapeaux, trois ans durant, embrayant tout aussitôt sur la guerre de Quatorze d’où il sortit mutilé, tandis que son jeune frère repose au cimetière militaire de Beauvais.

C’est pourquoi je me revendique comme fils de Crémieux.

Et cet homme, Isaac Jacob Adolphe Crémieux, ce député, ce Juif originaire du comtat Venaissin qui fut si accueillant aux Juifs qu’on  les appelait alors "Juifs du Pape", je le bénis et célèbre sa mémoire dans tous mes gestes d’aujourd’hui et dans mes écrits.

Il me plaît à penser qu’il fut génétiquement responsable du plus grand écrivain français du XXe siècle, Marcel Proust, dont la mère, Jeanne Weil ─à qui il implore le baiser du soir qui seul lui permettra de dormir, aux premières pages d’À la recherche du temps perdu ─ était la petite-nièce d’Adolphe, ce qui fait de lui son arrière-grand-oncle maternel.

Mais il est d’autres états de service de Crémieux, comme d’avoir présidé, de 1863 à sa mort en 1880, l’Alliance Israélite Universelle (fondée en 1860), cette fameuse AIU qui, œuvrant à l’émancipation des dhimmis, fit de tant de Juifs d’Orient et du Maghreb des francophones pour la plus grande gloire de la France ─près de nous, Edmond Jabès, Jacques Hassoun, Lucien Élia, Naïm Kattan, Chlomo Elbaz et tant de Juifs du Maroc où débuta et se multiplia plus qu’ailleurs l’AIU…

Crémieux à Alger ou comment, treize jours durant, j’ai cessé d’être français

J'ai à cœur d'évoquer ici, en tant que fils de Crémieux, l'humiliation de mon père, mutilé de guerre en 14-18, légion d'honneur avec palme, croix de guerre et médaille militaire, soumis à l'exclusion des Juifs sous le régime pétainiste, puis rétabli dans sa nationalité française au bout de 13 jours.

J’ai conservé les deux convocations policières : dans l’une, il lui est demandé de venir "décliner sa qualité de Juif indigène d’Algérie" qu’il signa d’une écriture fiévreuse, maladroite, comme bâclée ; et l’autre, deux semaines plus tard où on lui signifie qu’en tant qu’ancien combattant et eu égard à ses états de service, il est rétabli, ainsi que toute sa famille, dans la nationalité française, et là on voit bien la signature ferme et belle qu’il a toujours eue.

De ce fait, ma présence à l'école comme seul Juif de la classe fut pour cela stigmatisée, avec un souvenir assez vif malgré mon si jeune âge de ce qui suivit : c’est là que pour la première fois je fus traité de "sale Juif".

Et il faut souligner, pour ne jamais l’oublier, cet antisémitisme spécifique à l'Algérie coloniale, si bien évoqué par Jules Roy dans Le Maître de la Mitidja, (l’un des volumes de la saga Les chevaux du soleil) qui rapporte en particulier l'arrivée triomphale de Drumont (auteur du pamphlet La France juive) à Alger et le pogrom ─ la "youpinade" ─qui s'ensuivit, à l’instigation de Max Régis qui dirigea le journal L’antijuif algérien, qui réclamait l’abrogation du décret Crémieux, antisémite furibond des rues d’Alger où défilaient ces troupes haineuses.

Ma mère qui y avait assisté dans les années trente se moquait de cet Italien (il se prénommait, en fait, Massimiliano) et de ses affidés qui clamaient dans les rues, accent restitué : "La Frantche aux Frantchais" ![1] Et il faut aussi rappeler, dans ce tombereau d’injures de l’antisémitisme d’Algérie, les propos insultants de l'Écho d'Alger, héritier de cette presse qui s'était tant opposée au décret Crémieux, et qui, dans ce droit fil, discréditait le gouvernement de Mendès France, alors même que ce dernier déclarait "L'Algérie, c'est la France, et non un pays étranger", en ne parlant de lui que comme "Mendès" en lui retirant la deuxième partie de son patronyme, voire "le juif Mendès", retombées évidentes de cette opposition au décret Crémieux qui, même en pleine guerre d'Algérie, n'hésitait pas ─ avant de l'encenser par la suite ─à discréditer Jacques Soustelle en prétendant qu'il s'appelait en réalité "Bensoussan".

Nous avons là, en somme, l’illustration de ce qu'a pu représenter pour les Juifs d'Algérie leur intégration problématique à la nation française par la grâce d'Adolphe Crémieux.

 

 

Re'hov (rue) Crémieux à Jérusalem

 

 

 

 

 

Cela nous semble bien loin, et pourtant que de fois a-t-on mis en doute l’authenticité française des Juifs, et comment s’étonner d’entendre encore aujourd’hui, dans la stupéfiante et odieuse recrudescence de l’antisémitisme : "La France n’est pas à toi, Juif", ce qui me rappelle tel slogan peinturluré sur les murs d’Alger : "Les Juifs en Palestine" !

Et bien ils y sont pour beaucoup et cette terre qu’on leur enjoignait de rallier s’appelle aujourd’hui Israël.

 

Albert Bensoussan  



[1] Cf. Geneviève Dermenjian, Antijudaïsme et antisémitisme dans l'Algérie coloniale, Presses Universitaires de Provence, 2018.

 

 

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Articles publiés sur notre site internet

(http://www.morial.fr), 

du 16 au 21 octobre 2022, par Colette Weinstein

 

 

 

APPEL À TÉMOIGNAGES

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Héritage des juifs d'Algérie : 17 Novembre 2022 à Ashdod, Israël

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JEUDI 17 NOVEMBRE 2022 À partir de 15 h 00 dans les salons de Bet Yad Lebanim

PASS JOURNÉE = 70 ₪
RÉSERVATIONS : Cécile & Maurice BENGHOZI : 05 25 31 18 26
Tel HEVRA IRONIT ASHDOD *6452

 

 

Décrets Crémieux du 24 octobre 1870

Par Jacques Bernard Sadon

Le 24 octobre 1870, neuf décrets, approuvés et signés, dotent l’Algérie d’une Constitution nouvelle, dont le septième, communément appelé "décret Crémieux", accorde la naturalisation collective aux Juifs d’Algérie : 

"Les israélites indigènes des départements de l’Algérie sont déclarés citoyens français. En conséquence, leur statut réel et leur statut personnel seront, à compter, de la promulgation du présent décret, réglés par la loi française."

Ce décret ne recueille pas l’unanimité. Les milieux conservateurs l’accusent d’avoir "transformé la France en une nouvelle Jérusalem".

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Décret Crémieux : témoignage de Sidney Saadia Chouraqui

"ll était né pour être Rabbi, le bon Rabbi prêchant Dieu, la Vertu et la bienfaisance...". "Il  est une révolution de I 'histoire" J.J. Weiss

La personnalité de Crémieux : Né à Nîmes le 30 avril 1796, Isaac Adolphe, fils de David Crémieux, riche négociant en soieries, originaire de la ville de Crémieu dans le Dauphiné et de Rachel Carcassonne, issue des anciennes familles de Provenz (Avignon - Carpentras) où ces deux grandes familles, fixées depuis le début du XIVème siècle, jouèrent un rôle important aussi bien dans la communauté juive que dans les choses publiques.

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Abrogation du Décret Crémieux (7 octobre 1940)

Extrait de la thèse de Jacques Bernard Sadon

 

La loi portant abrogation du décret du 24 Octobre 1870 et fixant le Statut des Juifs indigènes des départements d'Algérie.

Bien que chronologiquement postérieure à la loi portant sur le statut (3 octobre 1940) ce fut l'abrogation du décret Crémieux qui fut promulguée en premier en Afrique du Nord et c'est donc la première loi discriminatoire que le régime de Vichy rend officielle.

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LES JUIFS D'ALGÉRIE SOUS VICHY (1940 -1943)

Par Jacques Bernard SADON 

 

Le travail de recherche auquel s’est livré l'auteur de cette thèse de doctorat, concerne le sort réservé à la communauté juive d'Algérie durant la période 1940-1943, et plus précisément celui des enfants des écoles primaires et secondaires victimes de l'éviction scolaire instaurée par le recteur d'Alger Georges Hardy.


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La synagogue Ben Toua par Simon Darmon

 

La Synagogue Ben Touarue Sainte, était célèbre à Alger, à deux titres.

D'abord parce que les bancs, la Téba, l'arche sainte et l'escalier intérieur avaient été fabriqués des restes de la flotte de Charles Quint, après l'échec de sa tentative de la prise d'Alger en 1541. Cette synagogue a été immortalisée par le fusain de l'artiste Alphonse Lévy.

Et ensuite parce qu'elle porte le nom de ce célèbre rabbin Abraham (E)Ben Toua (1510-1580) venu d'Espagne, descendant de Nahmanide et donc de Rachbats. Il a écrit de nombreuses responsa dont une trentaine figure dans le Hout Hamechoulach (qui est la 4e partie du Tachbets de Rachbats).  


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Le 1er Pourim Edom - Pourim d’Alger

Le 23 octobre 1541 (4 Héchan 5302), s'est produit à Alger un événement miraculeux, appelé le "Pourim d’Alger"

 

En 1492, les Juifs sont expulsés d'Espagne. Certains trouvent refuge en Afrique du Nord mais la menace de nouvelles persécutions pèse sur eux.
En automne 1541, Charles-Quint, petit-fils d'Isabelle la Catholique et de Ferdinand II d'Aragon, décide de mener une lutte sans merci contre l'Empire Ottoman.
Le 19 octobre, les Espagnols se présentent devant Alger avec une flotte impressionnante, décidés à prendre pied dans cette terre d’Afrique pour y chasser les Turcs.

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Paracha Noa'h

Lecture le 29 octobre 2022 / 4 Hechvan 5783

Par Caroline Elishéva REBOUH - Il est écrit : ונח מצא חן בעיני ה' - Noé trouva grâce aux yeux de l'Eternel.

En inversant les lettres de Noah-Noé on trouve le mot hen-grâce.

Y a-t-il un rapport entre ce mot et la qualité de Noé : ish tsadik, un homme juste. En effet, il y a un rapport très étroit entre ce mot "grâce-hen" car au moment où Noé vivait, les hommes alentour ne se conduisaient pas bien ce qui poussa 'HaKadosh Baroukh 'Hou à vouloir détruire le monde.


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HAFTARA de Noa'h

Lecture :  Isaie 54 1-10
Par Caroline Elishéva REBOUH

Cette haftara est prise dans "Isaïe" chapitre 54 et les cinq premiers versets du chapitre 55.

Ainsi que nous l’avons déjà signalé, les haftaroth proposent des textes prophétiques qui présentent un certain parallèle avec la péricope de la semaine.

Dans NOAH, il est question de la  colère de D face à cette humanité constituée d’impies. Puis des eaux destructrices du déluge et du retour à la paix.


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