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Bienvenue sur le site de l’association MORIAL

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L’ensemble de la base de données que nous constituons sera  régulièrement enrichie par ce travail continu de collecte auquel, nous espérons, vous participerez activement.  L'intégralité du site de Morial sera déposée au Musée d’art et d’histoire du Judaïsme (MAHJ) à Paris, pour une conservation pérenne .

Tlemcen, le kiosque à musique au centre ville
Médéa : rue Gambetta (1945)
Alger : rue d'Isly (1930)
Une oasis à Ouargla (Territoire du Sud algérien)
La Grande Poste d'Alger (Photo J.P. Stora)
Square Bresson
Lycée E.-F. GAUTIER D'ALGER
Service Alger - Bouzareah
Alger : le marché de la place de Chartres
MEDEA - Le Café de la Bourse
Guyotville - La Plage

 

Par Danielle MORALI
Implantés de longue date en Algérie, les Juifs acquièrent la nationalité française en 1870 par le vote du décret Crémieux.

Originaire d’Espagne puis d’Italie, la famille Morali s’installe au XVIIIème siècle à Alger, elle compte de nombreux savants et rabbins dont le premier rabbin d’Alger, Zerahia Morali.

Né en 1867 à Alger, Isaac Morali est le fils de David Raphaël Morali, homme pieux exerçant les fonctions de ministre-officiant à titre bénévole et en même temps “commerçant d’une honnêteté exemplaire” comme le rapporte Abraham Elmaleh dans Le dernier Mohican de la poésie hébraïque sépharade en Afrique du Nord (Barcelone, 1954) consacré à Isaac Morali.

Il épouse en 1894 Anaïs Camille Kaoua, descendante du rav Enkaoua de Tlemcen.

Ils eurent une nombreuse famille et vécurent à Belcourt puis Kouba près d’Alger.

Anaïs Kaoua s’éteignit à Nancy fin 1968 auprès de son fils Simon Morali, Grand rabbin de Nancy à cette époque.

Le rabbin Zerahia Morali fut dayane et président du Tribunal rabbinique.

Il fut enterré au Midrach, nécropole réservée aux rabbins, rue Montaigne à Alger. Un de ses descendants, Jacob Morali, également rabbin-dayane d’Alger, fut enterré en 1912 dans cette même nécropole où se trouvaient les dépouilles de Ribasch et Rachbats, fondateurs de la Communauté d’Alger, venus eux-aussi d’Espagne au XIVème siècle.

Les dépouilles de ces saints hommes furent transportées au cimetière de Saint-Eugène d’Alger. Bien plus tard, en 1951, l’Ecole rabbinique d'Alger sera installée à cet emplacement rue Montaigne.

Dans le livre du Grand rabbin d’Alger Isaac Bloch paru en 1888 "Inscriptions tabulaires des anciens cimetières" recueillies et traduites, accompagnées de notices bibliographiques, on relève une épitaphe en hébreu inscrite sur la tombe du rabbin Zerahia Morali, dont la traduction en français par le Grand rabbin Abraham Bloch se trouve sur le mur de la grande Synagogue d’Alger, place Abraham Bloch, ancienne place Randon. Voici cette épitaphe :

Venez entonner des complaintes aux tristes accents.

Monument ! Informe-toi auprès des passants

De l’ami qui s’est caché dans les cavernes des roches

Des épreuves successives passèrent sur sa tête jusqu’à ce que

son heure sonnait et qu’il descendit au tombeau.

Temps perfide ! Pourquoi agir ainsi ?

Pourquoi opprimer les serviteurs de D. innocents et pieux.

L’homme intègre, l’honorable rabbin Zérahia (qu’il repose en paix)

Connu dans la ville forte sous le nom de Morali

Fut savant parfait, Chef de l’école talmudique

Juge de sa communauté, un cerf parmi les jeunes paons.

Il était expert dans le Talmud et tous les décisionnaires

surtout le glorieux Rambam et Joseph Karo.

Mon malheur est très grand, ma force m’abandonne.

La joie de mon cœur est bouleversée, les chants ont cessé

En 1866 (yar 5626), il a rendu avec souffrance son âme

Qui remonte se délecter au milieu des cantiques.

 

Isaac Morali aurait voulu faire ses études à l’Ecole rabbinique de Paris, mais son père ne pouvant se séparer de lui, il fit ses études dans la grande Yéchiva Ets-Haim fondée en 1873 (5633) à Alger par un de ses parents nommé Joseph Morali.

Le jeune étudiant se perfectionna en Talmud chez le rabbin Moïse Dadoun professeur en chef de cet établissement. Constatant l’assiduité et l’amour ardent pour les études hébraïques de son enfant, le père d’Isaac Morali avait souscrit pour son fils un abonnement au journal hébraïque Hammaguid et lui fit cadeau de l’ouvrage Talmud Leschon Ever de Ben Zéev, livre de grammaire par excellence.

Isaac dût se résigner à aider son père dans le commerce, mais il ne le supporta pas et abandonna ce “métier”. Il retourna à la Yéchiva Ets-Haim et en sortit diplômé rabbin et Choret en 1888.

Enseignant, Directeur du Talmud Torah, Isaac Morali forma de nombreux élèves et mit au point une nouvelle méthode pour enseigner l’hébreu.

Il publia de nombreux ouvrages. Dans son livre "Le dernier Mohican" de la poésie hébraïque séfarade en Afrique du Nord: Isaac Morali (Editions Consejo superior de Investigecionnes cientificas, Barcelone, 1954), Abraham Elmaleh cite notamment Les Secrets dévoilés, commentaires sur la Bible et les Pirké Aboth (1897) - Hessed Véemet - Kolzémia Lurat Blem - Ein Gueddi - Yabut Itshaq Chem Ephraim (poème sur le rab Enkaoua de Tlemcen - Va y ater Itshaq Berit Itshaq - Maskiot Kessef Mizimat Haaretz - (les meilleurs produits du pays) Midbar - Yam, mélanges littéraires - On Zarouah 1908 Millé de Aboth - Zérah Itshaq - Guerre et Paix - Milhame Vechalom Alger (1929).

 

 

   

 

Parlant l’arabe et l’hébreu, c’est en 1913 qu’Isaac Morali traduit pour la première fois en français l’ouvrage de Saadia Gaon La dissertation homilétique sur le Décalogue, écrit en arabe. Cette traduction fut accueillie par les communautés d’Algérie et de Tunisie avec un très grand succès. Cette œuvre qui se lit à Chavouoth (Pentecôte), d’une grande finesse poétique contient les Dix Commandements et a été rééditée de nombreuses fois, parfois même sans citer le nom du traducteur.

Dans sa préface documentée, Isaac Morali souligne que si Israël a survécu à ses oppresseurs, c’est grâce à la transmission de sa doctrine qui est un “arbre de vie”.

C’est pourquoi il destine la traduction de cette œuvre aux jeunes qui ne sont plus familiarisés avec la langue arabe. Il évoque l’histoire du peuple juif dispersé adoptant la langue du pays où il se trouve et le rôle nécessaire des traductions et des médiateurs. Il retrace la vie et l’œuvre de Saadia Gaon qui défendait au Xème siècle à Bagdad la loi contre les attaques des Caraïtes.

Saadia Gaon traduisit la Bible en arabe et Isaac Morali dont on admire l’information souligne “qu’à l’occasion du millénaire de sa naissance, en 1892, Joseph Dérenbourg, le savant orientaliste entreprit avec le distingué professeur W. Bacher de Budapest une nouvelle publication de l’œuvre de Saadia Gaon.”

 

Voici le Chant du Décalogue, dans la traduction d’Isaac Morali (il est d’usage de chanter ce poème sur l’air de Bassarh):

 

J’entends ton Verbe encor dire du haut des cieux :

“Je suis Adonaï, ne sers point de faux dieux.

“Ne profère jamais en vain mon Tétragramme,

“De peur que contre toi mon courroux ne s’enflamme,

“Observe le Chabbat, saintement et content.

“Honore tes parents et tu vivras longtemps.

“Dompte tes passions, ne commets point l’inceste.

“Du vol même caché, crains le dur châtiment.

“Fuis cette trahison : Témoigner faussement.

“Que tes yeux ne soient point envieux ni cupides ;

“Combats la convoitise et ses charmes perfides.

“Alors je fixerai le bonheur sous ton toit,

“Et la paix comme un fleuve ira couler vers toi.”

 

Isaac Morali puisait son inspiration dans les textes bibliques. Pour lui, les valeurs prônées par les Prophètes trouvaient un écho dans les valeurs de la France, exaltant la paix, la science et le progrès. Les poésies écrites à la fin de la guerre 1914-1918, sont une illustration de ces dispositions et en donnent un ensemble exaltant dans Guerre et Paix. Cet hymne à la Paix composé de 52 vers rappelle le nombre de mois écoulés depuis la déclaration de guerre le 3 août 1914 jusqu’à la signature du Traité de Versailles le 28 juin 1919.

 

Hymne à la Paix : Kol Sasson (juin 1919), extrait

 

Ô, paix que D. bénit, princesse de l’Eden !

Paix, du ciel fille aînée et de grâce parée,

Paix, dont la pure haleine est le soutien du monde.

Après toi, je languis. Ô cœur de l’univers.

Source de tous les biens, source du vrai bonheur !

Ma muse veut chanter un hymne en ton honneur.

De tout don gracieux tu fus gratifiée.

Beauté majestueuse, aux rayons scintillants

Ceinte de loyauté, de justice entourée.

Maintes fois, tu daignas visiter notre globe

T’arrêter au milieu de tes amis sincères,

Leur montrer tes trésors, tes splendides richesses,

Dévoilant les secrets des arts et des sciences.

Ta présence bénie animait tous les êtres

Faisant taire la ruse, la haine et la lutte.

 

En 1929, Isaac Morali publie Le Prophète Elie et la Paix universelle. En 1932, il révise avec un soin minutieux le Mahzor de Roch Hachana du rite algérois. Il y écrit en hébreu une importante introduction dans laquelle il fit l’inventaire des seize éditions qui ont précédé la sienne, de 1598 à 1908.

On y trouve, selon une habitude des poètes hébraïsants, sa signature en acrostiches. Son fils Simon Morali, rabbin, y traduit sa première poésie.

lus tard, en 1942 et jusque dans les années 1952, Simon Morali s’attela à la traduction d’un très grand nombre de pyoutim (poèmes) de ce Mahzor qui parut en 1952 et qui fut réédité de nombreuses fois depuis. La dernière édition à notre connaissance date de 1978.

Dans son ouvrage, Abraham Elmaleh écrit : “le rabbin Isaac Morali est le savant modèle à la fois maitre, enseignant et écrivain religieux ; sa science talmudique et ses connaissances exégétiques lui permirent d’instruire de nombreux élèves à l’école Ets-Haim, de former des disciples devenus célèbres pour la plupart et qui lui gardent une fidèle reconnaissance. Le rabbin Morali appartient à cette lignée d’hommes qui reflètent les plus purs penseurs du judaïsme du siècle dernier.

Comme un autre savant J.D. Luzzato, le rabbin Isaac Morali ne nie pas l’importance de la science, mais la science ne vaut pas pour lui le sentiment religieux qui seul est capable d’établir la suprématie de la morale. Poète et philosophe fécond, il s’est acquis par ses rares mérites une place de tout premier ordre parmi les savants et les hébraïsants de notre temps. Il faut comprendre la puissance de l’hébreu pour voir en lui un digne continuateur de Ibn Gabirol, Juda Halévy, Ibn Ezra, ces poètes de génie qui ont illustré l’histoire de notre peuple.”

Abraham Elmaleh conclut : “Le rabbin Isaac Morali fut un savant d’une rare vigueur d’esprit, esprit net, original et pénétrant, de caractère ferme et droit, d’une nature douce et bienveillante, d’une foi inébranlable”.

Dans un ouvrage consacré à l’Elite rabbinique en Algérie, publié en Israël (1996), Yossef Charbit, enseignant à l’Université Ben Gourion du Neguev, affirme qu’Isaac Morali fut “l’autorité rabbinique qui domina la période (première moitié du XXème siècle) ; il joua un rôle éminent à partir de la dernière décennie du XIXème siècle dans la propagation de l’enseignement de l’hébreu. Il fonda une école hébraïque, puis en 1904, le Talmud Torah Etz-Haim dont l’Alliance Israélite Universelle prit par la suite la direction. Parallèlement à ses activités éducatives et consistoriales, le rav Itzac Morali se consacra à l’investigation des sources de la liturgie des Juifs d'Algérie et composa lui-même plusieurs élégies et poèmes liturgiques. S’opposant à la ligne du rav David Moatti, plus intransigeante à l’égard des influences françaises, le rav Itsak Morali envisageait l’identification aux valeurs françaises comme propice aux Juifs d'Algérie.”

La tradition rabbinique de la famille s’est poursuivie avec Simon Morali qui exerça en France à Nancy, à Nice, à Paris, puis avec le fils de ce dernier, Sadia Morali, aujourd’hui installé en Israël.

 

Danielle Morali

Article paru dans la revue Kountrass (2000)

Mis en ligne par Danielle Morali, Nancy le 29 décembre 2020

https://fr.calameo.com/search#search-editions%20morali%20nancy/books

 

 

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